NOTES

 

Par l'artifice de l'autorisation pontificale aux peintures des tourments de l'enfer, Hugo rattache à 1593 un épisode de l'année suivante: la tentative de régicide du jeune Jean Châtel sur Henri IV, inspirée, selon l'enquête, par les jésuites. Le récit s'en trouve au tome 4, p. 176 et suiv. de l'Histoire générale de France depuis le règne de Charles IX jusqu'à la paix générale en 1815 de P. Dufau parue chez Didot en1820, dont les quatre premiers volumes se trouvaient à Hauteville House. En voici les extraits qui nous concernent:

« Henri, considérant l'inconnu, dit qu'il était trop jeune pour avoir fait un coup aussi hardi; mais dans ce moment, on vit à côté de lui un couteau qu'il avait jeté à terre. On l'arrêta sur cet indice, et on le conduisit au Fort-l'Evêque: il se nommait Jean Châtel; il était âgé de 18 ou 19 ans. [...]

Ce malheureux fanatique déclara, sur de nouvelles questions, qu'il avait étudié chez les jésuites, et en dernier sous le père Guéret; [...]. Livré au parlement, il subit d'autres interrogatoires. [...] On lui demanda à qui il devait de tels principes, et il répondit que c'était à la philosophie qui lui avait été enseignée chez les jésuites. On s'informa s'il n'avait pas été en la chambre des méditations ou ces pères introduisaient les plus grands pécheurs, qui voyaient en icelle chambre les portraits de plusieurs diables de diverses figures épouvantables, sous couleur de les réduire en meilleure vie, pour ébranler leurs esprits et les pousser par de telles admonitions à faire quelque grand cas; il répondit qu'il avait été souvent en cette chambre des méditations.

Cet assassin fut condamné par arrêt du parlement à subir l’affreux supplice infligé dans ce temps-là aux régicides.

[...] [Long développement sur l'histoire de l'ordre des jésuites conduisant à l'arrêt du parlement qui les maintenait dans leurs droits.]

Ce fut peu de temps après cet arrêt, qui avait vivement irrité un grand nombre de personnes, que Châtel tenta d'assassiner le roi. Dès qu'on sut que l'assassin avait révélé dans le premier interrogatoire qu'il était écolier des jésuites, on les regarda sans autre examen comme complices du crime. Le peuple se porta en foule devant leur collége de Clermont. Ils y auraient été massacrés, si le roi n'y eût promptement envoyé des gardes. On fit alors une visite dans ce collége. Le père Guéret, dont Châtel avait suivi les leçons, et le père Guignard, dans la cellule duquel on trouva des écrits criminels, furent conduits à la conciergerie. Les autres transférés à la maison de Saint-Antoine, et confiés à la garde des bourgeois. Châtel persista à déclarer, dans ses interrogatoires, qu’il n’avait été poussé par personne à l’action qu’il avait voulu exécuter. » A la fin de l'année 1594, les Jésuites sont interdits en France.

Hugo connaissait cet ouvrage: il en avait fait deux comptes rendus, en février 1820 et en janvier 1821, dans le Conservateur littéraire, et il y avait remarqué l'histoire peu connue de Jean Châtel: « Il faut savoir gré [...] à M. Dufau de ses réflexions sages et modérées sur un ordre célèbre, dans un moment où il vient de narrer l'attentat de Jean Châtel, et dans un siècle où le mot jésuites fait pousser des cris de rage. »

Il est curieux de voir le Hugo de William Shakespeare remonter, au moins pour sa documentation, aux temps du Conservateur littéraire.

 

Après une longue discussion, François-Victor Hugo retient la date de 1594 pour la publication d'une première version de La Sauvage apprivoisée. (Note initiale du volume VI Les Comédies de l'amour, p. 455-460.)